La du­ra­bi­lité, un choix éco­no­mique ju­di­cieux

Rapport annuel21 juin 2019

Le marché financier peut contribuer à atténuer le changement climatique en optant pour des investissements durables.

Article tiré du magazine annuel View

Les facteurs de risque ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) englobent un grand nombre d’aspects et leurs interactions sont complexes. Ils se répercutent sur les entreprises et les modèles économiques de diverses manières. « Au final, cela donne des informations que chaque analyste doit savoir analyser et traiter activement », déclare Sabine Döbeli, CEO de Swiss Sustainable Finance SSF. « Il faut que chacun se demande quels sont les risques liés à telle ou telle entreprise et à telle ou telle activité ».

Le pire comme le meilleur

Par investissement durable, on entend aujourd’hui essentiellement la prise en compte de facteurs ESG. L’investissement durable est cette forme de processus de placement où les facteurs ESG sont intégrés dans la décision de placement par le biais d'une procédure standardisée. « Pour un investisseur, cela signifie de choisir sciemment un titre, de le supprimer ou encore d’assumer pleinement son pouvoir d’influence par le choix de ses investissements », explique Sabine Döbeli.

La forme d’influence la plus ancienne, c’est l’exclusion : nous n’investissons pas dans les entreprises actives dans certains domaines controversés. Dans le cas de l’approche Best-in Class, les investisseurs se tournent au contraire vers les entreprises les mieux notées et investissent sciemment dans celles-ci. Créé en 1999, le Dow Jones Sustainability Index comprend les titres relevant des dix meilleurs pour cent d’une branche au regard des critères ESG. A vrai dire, cela ne signifie pas pour autant que ces entreprises sont nécessairement de bons investissements. 

Contribution active

La troisième approche, celle de l’intégration, consiste en une pondération entre les facteurs financiers et les facteurs durables. Les facteurs ESG ne sont pas évalués isolément, mais pris en compte lors de la décision d'investissement. Il est donc possible d'investir dans un titre, même si celui-ci n’est pas l’un des fers de lance de la durabilité. Un investisseur peut toutefois appliquer des critères ESG de diverses manières et pas uniquement par le biais de ses décisions d'investissement. Il dispose d'un pouvoir important lorsqu’il exerce son droit de vote. En outre, il peut aussi s’allier avec d’autres investisseurs et influencer la stratégie d'une entreprise par un dialogue actif avec cette dernière. « C’est là la forme la plus durable » affirme Döbeli. Lorsque les investisseurs soumettent directement à la direction d’une entreprise leurs suggestions pour une stratégie plus durable, cela déclenche un processus de changement au sein même de l’entreprise. Pour l’investisseur, cette approche présente l’avantage de contribuer activement au changement. Mais, elle comporte aussi un gros inconvénient : il est plus difficile de communiquer à son sujet. « C’est pourquoi, il est important qu’un investisseur ou un fournisseur de fonds puisse s'appuyer sur une unité de mesure pour prouver qu’il atteint aussi des objectifs durables », commente Döbeli. 

Un choix économique judicieux

Pour Sabine Döbeli, les investisseurs ont dorénavant tout intérêt à tenir compte de cette thématique, ceci essentiellement pour deux raisons. La prise en compte de facteurs ESG est un choix économique judicieux. « La plupart des études universitaires montrent que, sur le long terme, la prise en compte de facteurs ESG dans le processus de placement permet d’obtenir de meilleures performances, ou tout au moins des performances identiques, mais avec un risque moindre », affirme Sabine Döbeli. La seconde raison réside aussi dans la pression sociale actuelle qui implique d’assumer des responsabilités pour lutter contre le changement climatique. Cette pression découle de l’accord de Paris sur le climat en vertu duquel les flux financiers doivent être conçus de manière à être compatibles avec l’environnement. Par ailleurs, les investisseurs institutionnels doivent aussi veiller au bon respect des directives réglementaires. Certains domaines spécifiques, comme les investissements en infrastructure peuvent afficher une durabilité élevée, tout en exigeant des dotations en capital importantes. Pour atteindre les objectifs climatiques, l’industrie financière a un rôle important à jouer, mais il faudra bien plus que cela. Sabine Döbeli : « Même dans l’économie réelle, il faut du changement. »