Édi­to­rial

12 juin 2020

Le premier rapport de l'Association Suisse d'Assurances ASA sur la durabilité sort à une époque marquée par la crise du coronavirus. La durée et les répercussions à long terme de cette crise sur l’économie et la société ne sont pas encore estimables à la date de l’échéance rédactionnelle. Beaucoup de choses ne seront pas comme avant, mais tout ne sera pas nouveau. Avec ses multiples facettes, la durabilité est et reste la condition d'une économie stable, d'une société sûre et d’un environnement sain – y compris après le coronavirus.

Les assureurs privés suisses sont des employeurs, des contribuables et des investisseurs importants, en Suisse comme à l’étranger. Ils prennent en charge les risques que les entreprises ou les particuliers ne peuvent ou ne veulent pas supporter seuls. Ils leur permettent ainsi d’utiliser leurs ressources dans des perspectives de long terme et pour le bien de l’économie et de la société. Acteurs de premier plan et moteurs de l’économie suisse, les assureurs privés suisses assument une responsabilité économique. Cela se traduit notamment par un engagement clair en faveur de la durabilité et de sa mise en œuvre progressive dans les affaires d’assurance. Le présent rapport met en évidence les efforts fournis jusqu’ici par la branche dans les domaines des placements de capitaux, de l’écologie en entreprise et de la souscription. Il permet de dresser un état des lieux sectoriel et contribue à alimenter de la manière la plus factuelle possible les discussions sur la durabilité.

La durabilité est loin d’être nouvelle pour l’assurance. Les questions de durabilité relèvent depuis toujours des affaires d’assurances, qu'il s’agisse d’évaluation des risques, d’articulation de contrats d’assurance ou de prévention des sinistres. Il y a longtemps que les assureurs actifs à l’international en particulier prennent en compte les risques liés au changement climatique et qu’ils s’interrogent sur leurs répercussions sur l’environnement, la société et les affaires d’assurance. C’est la raison pour laquelle les compagnies membres de l’ASA se sont prononcées dès 2016 pour le respect de l’accord de Paris et ont soutenu les objectifs du Conseil fédéral en matière de réduction des émissions de CO2. Nombre d’entre elles ont également participé spontanément en 2017 à la première analyse réalisée par la Confédération sur la cohérence climatique du portefeuille des assureurs et des caisses de pension suisses et s’en sont ensuite servi pour dresser un bilan de leur propre situation.

L’opinion publique s’intéresse surtout à la durabilité des placements de capitaux. Investisseurs institutionnels importants avec un horizon de placement à long terme, les assureurs privés suisses entendent jouer un rôle moteur et s’efforcent de faire coïncider durabilité et rendement afin d’obtenir un réel impact sur l’économie. En la matière, les assureurs privés suisses se trouvent dans une situation relativement confortable. Les affaires d’assurance s’inscrivant par essence sur le long terme, elles ont besoin de placements sûrs générant des rendements stables sur la durée. Il est de plus en plus évident que les investissements durables répondent bien à ces exigences. Du point de vue économique, il n’y a donc aucune raison de ne pas se porter sur eux. Les compagnies membres de l’ASA sélectionnent leurs placements en tenant compte des critères de durabilité connus sous l’abréviation ESG (il s’agit des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance). 

L’ASA envisage de publier désormais ce rapport sur la durabilité à un rythme annuel et d’en améliorer en permanence la fiabilité. Ce rapport illustre notre conviction selon laquelle la responsabilité et l’implication individuelles constituent les meilleures conditions préalables à l’accroissement de la durabilité du cycle économique. En tant qu’acteurs économiques, la durabilité est dans notre propre intérêt. Il n’est pas nécessaire qu’elle fasse l’objet de prescriptions supplémentaires – pas même après la crise du coronavirus qui a mis en exergue le pouvoir régulateur de l'État dans des situations de crise. C’est la raison pour laquelle nous rappelons volontiers l’intention formulée par le Conseil fédéral avant la crise de s’en remettre au principe de subsidiarité et à l’économie de marché pour inscrire la durabilité dans le secteur des finances. L’économie de marché et la durabilité ne sont pas antinomiques – bien au contraire, elles se soutiennent mutuellement lorsque les conditions préalables ont été définies correctement. Nous devons suivre cette voie pas à pas.

Thomas Helbling, Directeur de l'ASA

Urs Arbter, Vice-directeur de l'ASA