Une an­née en tra­vail à do­mi­cile : cinq re­pré­sen­tants de la branche dres­sent un bi­lan

Contexte07 avril 2021

Depuis mars 2020, des milliers de collaboratrices et collaborateurs des assurances privées suisses travaillent depuis leur domicile. Même si des modèles de travail flexibles étaient déjà bien répandus dans la branche avant la crise du coronavirus, ils sont nombreux ceux qui ont dû s’habituer à cette nouvelle situation.

Nous avons interrogé cinq représentants du secteur de l’assurance sur leurs expériences du travail à domicile. Il en ressort que si la productivité ne souffre pas du travail à la maison, le principal défi consiste en une bonne séparation entre vie professionnelle et vie privée.

Jasmin Barbosa

Lors des pauses café virtuelles, on ne parle pas de travail : Jasmin Barbosa.

Jasmin Barbosa, 35 ans, responsable RH à la Vaudoise, domiciliée à Villeneuve VD

« La communication avec les personnes les plus diverses, c’est mon pain quotidien. À l’heure actuelle, une grande partie de ces discussions se déroulent à distance. Je vais néanmoins de temps en temps au bureau – par exemple pour les entretiens d’embauche ou pour signer des papiers. Si, lors d'un recrutement, les premiers entretiens se déroulent par téléphone, l’entretien final a toujours lieu de visu. Avant d’engager quelqu’un, nous souhaitons le rencontrer au moins une fois en personne.

Sinon, comme beaucoup d’autres, je travaille depuis mon domicile. Je n’ai eu aucun mal à m’y faire. Comme je travaille sur une tablette mobile, l’infrastructure était en place en un rien de temps. En outre, mon employeur a mis à ma disposition un écran et un casque. Le homeoffice présente quelques avantages : comme je n’ai plus besoin de me rentre à Lausanne, je gagne deux heures par jour. Sans compter qu’à la maison, je travaille de manière beaucoup plus concentrée et efficace.

Pour maintenir un tant soit peu les contacts informels avec les collègues, à la Vaudoise, nous avons introduit les pauses café virtuelles. Lors de ces réunions, il n’y a qu’une seule règle : ne pas parler du travail. Sinon, j’essaie aussi de faire régulièrement des pauses, même en télétravail ; au début, j’ai eu un peu de mal. Je mets à profit les heures de transport gagnées pour m’offrir des pauses plus longues le midi ou faire du sport. La Vaudoise propose un grand nombre de cours de fitness en ligne. Dès que j’éteins ma tablette en fin de journée, je sors me promener pendant une demi-heure. J’arrive à bien me déconnecter lorsque je suis au grand air. À l’heure actuelle, je ne peux pas imaginer travailler désormais à cent pour cent depuis la maison. J’aime le contact humain, j’en ai besoin – et il en sera toujours ainsi. »

Mauro Canevascini

Mener des entretiens clientèle dans le bureau partagé avec femme et fils demande de l’organisation : Mauro Canevascini.

Mauro Canevascini, 60 ans, responsable du centre de compétences dédié à la clientèle Entreprise, Helvetia Suisse, domicilié à Contra TI

« Ces dernières années, j’étais en déplacement professionnel trois à quatre jours par semaine. Depuis mars 2020, tout a changé – et j’avoue, les voyages me manquent. Bien sûr, les vidéoconférences sont très pratiques, mais les contacts humains n’y sont pas aussi intenses. Lorsqu’il y a plusieurs participants, il est difficile de bien prendre le pouls de la situation. Sans compter que les échanges informels qui ont souvent lieu avant ou après une réunion ne sont plus possibles. Or, c’est souvent dans ces moments-là que des idées et des réflexions intéressantes sont échangées et partagées.

Le télétravail présente aussi des avantages. La productivité est globalement plus importante. Par ailleurs, le caractère exceptionnel de la situation nous a permis de resserrer les rangs au sein de l’équipe. Je suis responsable de cinq collaborateurs. Puisque l’on ne peut plus se rencontrer en personne, il faut trouver d’autres moyens de préserver le contact. Personnellement, j’ai assuré aux membres de mon équipe qu’ils pouvaient me joindre à tout moment. En dépit de la distance géographique, ils doivent pouvoir compter sur moi – même le soir ou le week-end. Nous avons aussi créé un groupe de chat où nous nous tenons informés des affaires courantes.

À la maison, nous avons organisé un réel petit espace de coworking puisque mon épouse et mon fils sont aussi régulièrement en homeoffice. Comme nous vivons dans une maison très ouverte, il n’est pas toujours facile de trouver un espace séparé. Au fil du temps, je me suis habitué à organiser les entretiens avec mes clients et mes collaborateurs de manière à ne pas nous gêner mutuellement. En dépit des petits inconvénients comme celui-là, je peux tout à fait m’imaginer travailler désormais davantage depuis la maison. Helvetia offre cette possibilité à ses collaborateurs avec son nouveau modèle de « FlexOffice ». Pour autant, je n’ai pas envie de renoncer totalement à mes déplacements professionnels.

Après une intense journée de télétravail, j’éteins mon ordinateur et j’apprécie de pouvoir aller me ressourcer dans la nature. Avec ma famille, j’habite à Contra sur la colline qui surplombe Tenero. Les prairies et les forêts sont juste devant notre porte. Un vrai luxe. » 

Ivo Rotzetter

A pris l’habitude de partager une bière le vendredi soir avec les voisins également en télétravail : Ivo Rotzetter.

Ivo Rotzetter, 43 ans, Zurich Assurance, inspecteur des dommages corporels, domicilé à Albisrieden ZH

« J’avais prévu de travailler davantage depuis mon domicile à partir d’avril 2020. Du fait de la pandémie, cela s’est produit plus tôt que prévu. La conséquence, c’est que je n’avais pas encore tout bien préparé. Au début, j’avais juste un petit bureau et un seul écran au lieu de deux. Cela a pesé sur mes performances et aussi sur mon cou. Depuis, j’ai un nouveau bureau et un deuxième écran – et des épaules plus détendues. En outre, Zurich m’a envoyé gratuitement un pack flexwork comprenant un nouvel écran, une souris sans fil et un clavier.  

Même si je suis maintenant bien habitué au télétravail, il y a quelques différences par rapport à avant : l’une d’entre elles, c’est mon fils de quatre ans qui se réveille parfois très tôt. Il arrive que j’écrive mes premiers rapports dès 6 heures du matin. Cela me permet de mettre efficacement à profit les premières heures de la journée. Ces jours-là, en compensation, je m’offre une pause de midi plus longue. Un autre avantage, c’est que je peux dîner avec ma famille tous les jours.

Si je savoure ce temps supplémentaire passé avec mon épouse et mon fils, les échanges avec les collègues me manquent néanmoins. Au bureau, il y a souvent des rencontres spontanées dans les couloirs ou devant la machine à café. Cela permet de se sentir soudés et de renforcer l’esprit d’équipe, ce qui est moins le cas lorsque chacun travaille depuis chez soi. En revanche, la productivité n’est pas moins bonne – au contraire. Même si je progresse de manière très efficace dans mon travail, je dois tenir compte de quelques éléments supplémentaires : l’un d’entre eux, et non des moindres, c’est la protection des données. Je dois par exemple veiller à ce que les dossiers que je traite soient conservés en lieu sûr, à l’abri des regards indiscrets.

En fin de journée, j’ai plus de mal à éteindre mon ordinateur qu’auparavant. Bien que je m’efforce de terminer mon travail à temps, je n’y parviens pas forcément. Il arrive que je sois toujours en train d’étudier un dossier même après les horaires de bureau. Pour empêcher cela, j’ai pris l’habitude d’aller faire un petit tour après le travail. Soit je vais au square avec mon fils ou je retrouve des voisins qui sont aussi en télétravail. Avec le temps, nous avons pris l’habitude de partager une bière en petits groupes le vendredi en fin de journée. Qui sait : cette tradition perdurera peut-être après la crise du coronavirus. »

Vera Hirsch

Souhaite à l’avenir travailler à 50 pour cent au bureau et à 50 pour cent en télétravail, si elle a le choix : Vera Hirsch.

Vera Hirsch, 37 ans, responsable de la gestion des prestations Médicaments/Génétique, Sanitas, domiciliée à Zurich

« J’ai pris la direction de mon service en février 2020. Quelques semaines plus tard, nous étions tous en télétravail. Le premier confinement n’a pas été sans mal. Il a fallu caler les choses et régler quelques problèmes ici et là. Comme il n’y avait plus de garde d’enfants, avec mon mari, nous avons mis en place un système de rotation : le matin, je travaillais pendant qu’il s’occupait des enfants et, l’après-midi, nous échangions les rôles. Le soir, dès que les enfants étaient couchés, nous retravaillions encore quelques heures. Nous avons tenu ce rythme pendant sept semaines.

Nous avons été soulagés que les enfants reprennent le chemin de la crèche et du jardin d’enfants et avons alors pu mieux nous organiser à la maison. Pour bien vivre le travail à domicile, le secret, à mes yeux, c’est d’être en mesure de séparer strictement le « home » de l’« office ». Pour moi, cette prise de conscience a vraiment changé la donne. Si pendant le premier confinement, je passais parfois des heures depuis très tôt le matin jusqu’à tard le soir assise à un bureau plutôt spartiate, avec mon mari, nous avons depuis transformé la chambre d’amis en un bureau partagé – avec tout ce que cela comporte. De l’imprimante au tableau blanc jusqu’à la machine à café, tout y est.

Le soir, lorsque mon travail est terminé, je ferme la porte du « bureau » – et je déclare ainsi le début de la soirée ouverte. Nos enfants de 3 et 5 ans ont bien compris qu'il y avait désormais un bureau dans notre appartement. Au début, ils sont venus une fois ou deux toquer à la porte ; depuis, cette pièce ne les amuse plus vraiment.

Même si nous nous sommes très bien organisés à la maison et que j’ai appris à apprécier les avantages du homeoffice par rapport au travail en bureau paysager, aller au siège de mon entreprise me manque beaucoup. En ma qualité de responsable de service justement, je trouve que la proximité avec les collègues est importante. Avec les outils de chat et de visio, il est plus difficile d’arriver à prendre le pouls de l’équipe – c’est la raison pour laquelle, en ce moment, je demande régulièrement à mes collaborateurs comment ils vont, mieux vaut une fois de trop que pas assez. À l'avenir, si j'ai le choix, je partagerais mon temps à 50 pour cent au bureau et à 50 pour cent en travail à domicile. Une chose est sûre : je continuerai de séparer strictement le « home » de l’« office » ».

Marijana Krzelj (33 ans), spécialiste des assurances de personnes, Zurich Assurance, domiciliée à Zurich

« Lorsque j’ai été embauchée en janvier 2020 comme spécialiste au service des sinistres dans le domaine des prestations en assurances de personnes, qui aurait pu deviner les changements auxquels nous allions être confrontés ? Comme la Zurich Assurance promeut en général des modèles de travail flexibles, le passage au télétravail s’est effectué sans problème.

La collègue responsable de mon intégration m’a montré étape par étape la manière dont elle traite les dossiers. Grâce aux écrans partagés, cela a très bien fonctionné – c’était néanmoins une situation toute nouvelle pour moi. Outre le responsable d’équipe qui m’a étroitement accompagnée et soutenue, tous les autres collègues ont aussi pris le temps de se présenter via « Teams » au cours des deux premières semaines. Cela m’a fait énormément plaisir – de toute façon, nous n’avions pas d’autre solution pour parler avec les collègues entre quatre yeux. En dépit de l’assouplissement des mesures au cours de l’été qui m’a permis de me rendre au bureau et de faire personnellement la connaissance de certains collègues, il y en a plus de la moitié que je n’ai toujours pas rencontrés en vrai.

Même si les contacts personnels me manquent, je me suis bien habituée à mon nouveau poste. À la maison, j’arrive à me concentrer sur les dossiers et je peux téléphoner dans le calme. La réunion virtuelle quotidienne est une composante importante du travail à domicile. Ici et là, on trouve aussi le temps de bavarder de choses et d’autres.
 
J’entends régulièrement mes amis dirent qu’ils rallument leur ordinateur le soir pour régler encore deux ou trois choses. Pour ma part, je fais une distinction très nette entre l’activité professionnelle et le temps libre. Je considère que cette discipline est importante pour bien me reposer après une journée de travail et pouvoir recharger mes batteries. C’est le cas par exemple quand je fais du sport. Comme le centre de fitness est fermé pour le moment, je m’entraîne régulièrement à la maison sur un tapis de yoga. Lorsque je ne fais pas de sport, j’appelle ma famille et mes amis pour prendre des nouvelles et bavarder un peu. Et puis, je bouquine aussi beaucoup plus qu’avant. »